En finir avec le mal-logement

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Peut-on encore parler de simple “crise” du logement ? Facteur de mal-vivre et d’inégalités, le mal-logement s’aggrave en France de façon massive et diffuse.

En dix ans, le nombre de personnes sans domicile a augmenté de 50 %. En 2016, près de 4 millions sont mal logées, 1 sur 6 est en situation de fragilité par rapport à son logement.

Si la qualité des habitations s’améliore, la flambée des prix de l’immobilier rend l’accès au logement de plus en plus difficile. Les dépenses contraintes (loyer ou mensualités d’accession, charges d’énergie et d’eau) se sont envolées : plus de 5 millions de ménages sont en précarité énergétique.

Ce mal-logement coûte cher, sur un plan humain, économique et environnemental. Il frappe les plus exclus et fait basculer dans la précarité ceux dont les revenus sont simplement  modestes.

Comment dès lors relever l’immense défi de la transition écologique, agir sur l’emploi, sur l’éducation, sur la santé sans traitement efficace et durable du logement ? Comment simplement penser à l’avenir, si chacun ne se sent pas à l’abri ?

Sans politique du logement digne de ce nom, aucun projet de société des Jours heureux ne pourra se construire.

Cap à prendre

 Aider les plus aisés en espérant que les effets positifs “ruisselleront” ensuite sur les plus modestes est une illusion : l’intervention publique sur le logement doit cibler avant tout l’investissement en direction des plus fragiles.

Ce n’est pas qu’un impératif social : une telle politique génère en cascade de multiples effets positifs. Ainsi, la réhabilitation énergétique et écologique des logements permet de réduire le mal-logement, de redonner du pouvoir d’achat par la baisse des charges, de créer des emplois locaux durables dans les PME du bâtiment, de réaliser des économies sur les dépenses de santé grâce à des logements assainis et d’avoir un moindre impact environnemental par l’emploi de matériaux écologiques et la baisse des consommations d’eau et  d’énergie.

Aux côtés du logement social, le parc privé doit aussi remplir son rôle. Il faut aller au bout de l’encadrement des loyers dans les secteurs  tendus et faire revenir le “capital dormant” des investis- seurs institutionnels : les banques et assurances détenaient en France un million de logements au début des années 1990 avec un effet stabilisateur important sur le marché locatif, elles en détiennent aujourd’hui moins de 100 000 !

Enfin, accéder à la propriété avec l’espoir souvent illusoire d’un enrichissement individuel ou alimenter la rente foncière en versant à vie un loyer… : n’a-t-on vraiment pas d’autre choix ? Des alternatives existent qui doivent être soutenues et développées.

Actions immédiates

A  –  Priorité à l’urgence sociale avec maîtrise des charges

La priorité portera sur les plus démunis. Tout soutien public sera assorti d’une contrepartie de maîtrise des coûts pour les habitants : prix de vente, conventionnement du loyer, actions de réduction des consommations d’eau et d’énergie.

B  –  Réhabilitation massive de l’existant privé

Produire du logement, c’est bien sûr construire, mais aussi réhabiliter, transformer le bâti existant. La grande majorité des logements indignes et des “passoires thermiques” se situent dans le parc privé, ce qui implique :

  • de coupler l’indispensable obligation de rénover à des mécanismes financiers incitatifs mêlant subvention et prêt, modulables en fonction des ressources ;
  • de penser globalement la réhabilitation lors des acquisitions ou mutations en prenant en compte les investissements nécessaires pour produire des logements de qualité permettant une juste valorisation du bien.

C  –  Transparence de la politique publique du logement

La politique publique du logement devra faire l’objet d’arbitrages transparents entre l’État et les collectivités, avec une répartition équitable et solidaire de l’effort de production des capacités d’hébergement et de logement social entre les territoires.

D  –  Développement de modes alternatifs d’habiter

Les modes alternatifs d’habiter seront fortement soutenus, tels le démembrement de propriété (emphytéose, bail à réhabilitation), l’habitat coopératif ou la cohabitation intergénérationnelle permettant le maintien des personnes âgées à domicile.

E  –  Le droit au logement dans la Constitution

Parce qu’il n’est pas une marchandise comme les autres, le logement ne peut dépendre d’un marché spéculatif avec injonction à la collectivité d’en réparer les excès. Le droit au logement est un droit fondamental. Il sera à ce titre inscrit dans la Constitution.

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