(Re)créer un urbanisme de convivialité

Auteurs

Constat

Nos villes et nos territoires sont l’ossature de notre société. La qualité de notre quotidien, de notre bien vivre ensemble, découle directement de la manière dont nous concevons et organisons ces espaces. Or nous construisons des barrières au lieu de tisser des liens et nous introduisons de la fragmentation et de l’individualisme là où il faudrait fluidité et échanges.

Aujourd’hui, l’artificialisation des sols ampute les espaces naturels et agricoles de la surface d’un département tous les sept ans. Les habitants des centres urbains ne sont plus nourris par les cultures en proche périphérie. Le zonage entre habitat, travail, loisirs et commerces impose l’usage contraint de la voiture individuelle. Des bâtiments et des grands équipements sous-employés, voire inutiles, gaspillent de précieuses ressources en espaces, matériaux et énergies.

Cet urbanisme conformiste, dicté par la facilité et des réglementations souvent contradictoires, privilégie la rentabilité et le court terme, disloquant peu à peu l’intégrité sociale. Nos villes et territoires deviennent ainsi source de conflits et de mal-être, alors qu’ils devraient être des lieux d’expression du possible et du désirable.

Cap à prendre

(Re)créer un urbanisme de convivialité implique de redéfinir le vivre ensemble autour de nouvelles solidarités, de retrouver le sens de l’urbanité et de la mutualisation tout en réduisant au maximum les nuisances sur l’environnement et la santé.

Ce changement de paradigme commence par remettre en question des modèles hérités du siècle passé par l’intégration d’une triple diversité : diversité sociale et culturelle des habitants, réel rempart contre la stigmatisation et l’exclusion ; diversité biologique par la végétalisation d’espaces publics et de toitures, et la création de jardins et potagers collectifs ; enfin, diversité des usages et des services : ainsi tout projet urbain devrait offrir les services essentiels (médecin, pharmacie, garderie, écoles, poste) dans un rayon de quelques minutes à pied ou en transport doux.

Pour vivre des jours heureux au sein de nos villes et territoires, nous devons les enrichir d’initiatives citoyennes, d’intelligence collective et de solidarité. Nous devons les ménager au lieu de les aménager.

Actions immédiates

A  –  Impératif d’éco-conditionnalité

Toute opération urbaine, en neuf ou en rénovation, ne doit être possible qu’aux conditions suivantes :

  • existence, ou création avec un financement sécurisé, de modes de transports alternatifs, rapides et interconnectés ;
  • interdiction de tout nouveau projet sur des espaces à forte valeur de biodiversité ;
  • concertation avec les habitants et les riverains très en amont des opérations, par un processus de choix dynamique autour de plusieurs projets alternatifs, dont l’évaluation des impacts doit être quantifiée et qualifiée ;
  • compensation de l’artificialisation des terrains par la création de surfaces avec des fonctions d’agrément (parcs publics), de renforcement de la biodiversité (mares, haies) ou de production alimentaire (maraîchage péri-urbain en circuits courts) ;
  •  conception bioclimatique (matériaux bio-sourcés ou géo-sourcés, “droit au soleil hivernal”, contribution à la création d’îlots de fraîcheur, intégration de continuités écologiques, renforcement de la porosité hydraulique) ;
  • interdiction de toute construction en périphérie tant que l’impossibilité de le faire en centre-ville n’a pas été prouvée.

B  –  Neutralité des impacts

Tout aménagement urbain et toute construction doivent tendre vers un bilan net zéro énergie primaire non renouvelable, zéro émission de gaz à effet de serre, zéro déchets toxiques.

Cet objectif est d’ores et déjà à notre portée comme en témoignent en Europe de nombreux projets initiés par des autorités locales ou par les citoyens eux-mêmes.

C  –  Mobilité apaisée et mutualisée

S’affranchir de la colonisation de la ville par les voitures exige :

  • de généraliser des zones de circulation qui évoluent avec l’usage ;
  • de renforcer le transport collectif et l’auto-partage tout en donnant la priorité au développement de véhicules conçus pour la ville (légers, de taille réduite, quasi-zéro pollution) ;
  • d’effectuer une rapide mutation vers des véhicules hybrides électrique et gaz d’origine renouvelable (non fossile) pour les déplacements interurbains de personnes, les utilitaires et les poids lourds.

D  –  Adapter la fiscalité à la vérité des coûts

Refondre la fiscalité sur le foncier et le bâti afin de faire porter les surcoûts induits par l’étalement urbain par les structures d’aménagement et de développement, et encourager ainsi la mixité sociale et fonctionnelle.

À l’échelle d’un bâtiment, d’un îlot ou d’une rue, encourager à la fraternité comme socle du vivre ensemble en liant des budget participatifs et des réductions fiscales à l’intégration des personnes fragilisées.

Ressources

Pour aller plus loin :

  • EK, revue d’architecture responsable :  ECOLOGIK