Pour un renouveau de notre Sécurité sociale

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Constat

Dans la France de 1945, le projet politique de sécurité sociale a su conjuguer mieux-vivre et redressement en instaurant des droits fondés sur les principes de solidarité et de redistribution : protéger les travailleurs des aléas du marché, garantir la vieillesse par un revenu, assurer des soins pour tous, aider la famille et réduire les inégalités.

Or, la Sécurité sociale est présentée aujourd’hui avant tout comme un coût à réduire. Une telle vision produit et creuse des inégalités, sanitaires, sociales et territoriales, nourrit la crise économique et environnementale, et au final engendre encore plus d’“insécurité sociale”.

Il faut renouer avec un véritable projet politique de sécurité sociale pour conforter les valeurs de la solidarité contre l’individualisme. Il faut accompagner et sécuriser les personnes tout au long de leur vie, dans les parcours professionnels, les situations de dépendance, les besoins de santé, de soins et de prévention.

Cap à prendre

La protection sociale, c’est 34 % du PIB (produit intérieur brut). Les décisions la concernant ne peuvent être confisquées par des experts, sous le seul angle de la réduction des coûts. Il est temps d’instaurer un large débat national et citoyen sur son avenir et ses missions, qui doivent :

  • s’inscrire dans une logique de développement durable en donnant une dimension collective et universelle aux prestations sociales et en renforçant leur caractère redistributif ;
  • instaurer de nouveaux droits dans une approche préventive et non uniquement réparatrice et indemnisatrice ; il faut notamment renforcer la médecine du travail et la médecine scolaire ;
  • renouer avec une gestion démocratique de la Sécurité sociale permettant à la société civile (syndicats, mutuelles et associations) de porter le projet politique ;
  • considérer son financement comme un investissement pour toute la société ;
  • rompre avec la marchandisation de la santé en améliorant les prises en charge par l’Assurance maladie et la revalorisation des actes et tarifs opposables, et en régulant l’activité sanitaire sur des bases d’efficacité sanitaire et non de maîtrise purement comptable ;
  • conforter le rôle social des mutuelles à but non lucratif, réduire ce qui reste à leur charge, apporter des services de proximité, répondre aux besoins d’accompagnement des personnes et des aidants ; les mutuelles solidaires participent pleinement à ces réponses par leurs actions de prévoyance et d’entraide dans un cadre démocratique, parce qu’elles appartiennent à leurs adhérents et parce qu’elles sont gérées par des administrateurs bénévoles.

Actions immédiates

A – Élire (et non désigner) des administrateurs aux caisses de Sécurité sociale.

Les dernières élections ont eu lieu en… 1983. Les administrateurs sont aujourd’hui non plus élus mais désignés, ce qui représente un affaiblissement de la démocratie sociale. Renouveler les formes de démocratie représentative et participative, c’est aussi “faire campagne” pour la Sécurité sociale, en particulier auprès des jeunes, en enseignant son histoire et son fonctionnement au lycée.

B – Élargir le financement de la Sécurité sociale à toute la valeur ajoutée produite, dont les revenus financiers.

Est-il normal que dans certains secteurs (finances, énergie, industrie pétrolière…), les cotisations soient deux fois moins élevées par rapport à la richesse produite que dans d’autres secteurs parce qu’on y emploie moins de salariés ?

Il est aussi nécessaire d’instaurer une prime de “mieux-value sociale” en valorisant les entreprises socialement  et écologiquement responsables.

C – Une mutuelle pour tous.

Des aides à la mutualisation existent – CMU-C (couverture maladie universelle complémentaire), ACS (aide au paiement d’une complémentaire santé pour les salariés et les retraités) –, mais elles sont fragmentées entre populations et générations, sont illisibles et entraînent des renoncements aux soins. Il faut revenir à une solution universelle sous forme d’un crédit d’impôt ou d’un chèque santé pour rendre égal l’accès à la couverture complémentaire. Il faut aussi supprimer la taxe spéciale sur les conventions d’assurance (TSCA) de 7 % dans le cas des contrats responsables et solidaires des mutuelles.

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